Conseil des «Dumegã»

La Communauté villageoise d’Agu-Kebo-Toé à l’instar des autres Communautés villageoises de Coutumes et de Traditions Eʋe a toujours été vivifiée depuis sa fondation au 18e siècle de l’ère actuelle par des Personnages-clé communément appelés des «Dumegã» qui ne sont pas des élus issus d’un scrutin populaire quelconque, mais sont plutôt des Personnages de Référence au regard de leurs Actions concrètes en faveur de la communauté pour sa survie harmonieuse au fil des générations.
Les Actions de ces Personnages-clé sont habituellement structurées autour de Trois Pôles conceptuels que sont:

  • Atám (la Foi)
  • (l’Intellect)
  • (la Fortune)

Le schéma ci-après illustre l’interaction entre ces Trois Pôles conceptuels:

 

 


Schéma illustrant la Position incontournable des «Dumegã» dans la Structure sociale de base des Eʋe (Crédit:PYRAMID OF YEƲE)

Le Concept d’Atám (la Foi) dans la Philosophie politique du Peuple Eʋe n’a rien à voir avec une croyance naïve et aveugle en un messie, en un paradis ou en un enfer après la mort selon certains écrits religieux exotiques. Il renvoie plutôt à la capacité innée en tout Être humain de se découvrir comme étant une Créature divine à l’image du Créateur divin, de découvrir ses propres Potentialités et sa propre Destinée, de s’évertuer à les faire épanouir pour accomplir cette Destinée en conformité avec les Lois divines immuables inhérentes à Mère-Nature.
Le Concept d’ Atám a donné en Eʋegbè des expressions idiomatiques telles que ká Atám (prêter solennellement serment) et Atámkáyí (Sabre sacré de Prestation de Serment).
Le Concept de (Intellect) dans la Philosophie politique du Peuple Eʋe n’a rien à voir avec la scolarisation à l’occidentale et encore moins avec des diplômes et titres académiques à l’occidentale. Il renvoie plutôt à la Faculté de Cognition innée en tout Être humain et à l’habileté d’un Être humain à utiliser eficacement cette Faculté innée pour produire des Connaissances et des Idées profondes, utiles, holistes voire futuristes. Le Concept de a donné en Eʋegbè l’expression idiomatique typique Sádzí (l’Intellectuel ou l’Expert).
La Communauté villageoise d’Agu-Kebo-Toé à l’instar de l’ensemble du Peuple Eʋe a toujours compté depuis son existence des Intellectuels et des Experts dans divers domaines qui n’ont pas besoin de recevoir préalablement l’onction d’une Institution académique étrangère.
Le Concept de (la Fortune) pour sa part dans la Philosophie politique du Peuple Eʋe n’a rien à voir avec le fait d’amasser de façon orgueilleuse et égoïste des biens matériels superflus et des capitaux financiers indus. Il renvoie plutôt à la Faculté des Êtres humains à disposer judicieusement des Ressources naturelles pour la production et la distribution de Biens et de Services au profit de l’ensemble de la Communauté et même au-delà. Le terme a donné pour sa part des expressions idiomatiques typiques en Eʋegbe telles que Hótɔ (un/e Fortuné/e) et Hókui (le Cauris comme monnaie d’échange). La Communauté villageoise d’Agu-Kebo-Toé à l’instar de l’ensemble du Peuple Eʋe a toujours compté des Fortuné(e)s qui ont toujours su mettre judicieusement leur Fortune au service de leur Communauté, sans qu’ils n’attendent de recevoir initialement l’aval ou l’onction des institutions financières étrangères comme les Bourses de spéculation financière de New York, de Francfort ou de Tokyo.
La Communauté villageoise d’Agu-Kebo-Toé a toujours regorgé de «Dumegã» issus de ces Trois Pôles conceptuels qui ont toujours agi (parfois ouvertement et parfois discrètement) de façon convergente et concertée pour la Survie collective de la Communauté villageoise au profit des générations futures.
La qualité de Personnage prééminent attachée à la position des «Dumegã» ne confère pas seulement des honneurs sociaux, mais aussi et surtout des Obligations impérieuses et des Devoirs civiques.
Quelques uns de ces Devoirs civiques et Obligations qui incombent aux «Dumegã» consistent en Soutiens, en Appuis et en Assistances nécessaires de tous ordres qu’ils sont appelés à apporter efficacement à la Chefferie coutumière afin que celle-ci puisse accomplir sa tâche administrative très délicate de la Gestion des diverses Affaires de la Communauté.
L’interaction entre les «Dumegã» crée des interfaces sociales très actives sous forme de Conseils connus sous l’appellation de «Duha».
Un «Duha» dans la Philosophie politique Eʋe ne doit pas du tout être confondu ou ravalé à un parti politique au sens classique que lui donne la prétendue ‘démocratie à l’occidentale’ pour les raisons suivantes :

  1. Premièrement, un «Duha» ne se donne pas pour objectif de conquérir un pouvoir politique quelconque et de le gérer seul au nom d’un parti ou d’un groupe de partis politiques, comme le préconise la prétendue ‘démocratie à l’occidentale’.
  2. Deuxièmement, les membres d’un «Duha» habituellement appelés les «Agbonugla» ne sont pas élus par l’ensemble des membres de la communauté, car cela risque de faire trop du désordre. Ils sont plutôt cooptés en fonction de leur engagement citoyen avéré par les «Dumegã» qui à leur tour n’ont pas le droit d’appartenir à un «Duha» afin d’éviter des conflits d’intérêts directs ou ouverts.
  3. Troisièmement, les «Duha» (qui sont généralement au nombre de Trois au maximum dans toute communauté quelle que soit sa taille et les démembrements) ne fonctionnent pas dans un esprit de concurrence mutuelle (comme c’est le cas des partis politiques classiques à l’occidentale), mais plutôt dans un esprit de convergence vers le maintien en vie et la protection des Normes et des Valeurs insufflées à l’ensemble de la communauté par l’Organe législatif dénommé «To».

Les membres et assesseurs de cet Organe s’appellent les «Tonugla», comme le schéma ci-après en donne une illustration :


Illustration de la Structure sociale montrant l’interaction entre les Dumegã, les Agbonugla et les Tonugla dans la Philosophie politique Eʋe. (Crédit: PYRAMID OF YEƲE)

Le terme «To» a donné en Eʋegbe le mot composé «To-lílí» qui désigne le Rituel hautement sacré de consécration de l’Organe législatif coutumier. Il a également donné le mot composé «Tolíʄé» qui désigne quant à lui le site (qui devient hautement sacré par la suite) ayant abrité ce Rituel hautement sacré de consécration de l’Organe législatif coutumier («To»).

(Travail en cours …)

Références bibliographiques:

  1. AMENUMEY, D. E. K.: The Ewe in Pre-colonial Times: A political History with special Emphasis on the Anlo, Ge and Krepi. Accra: Sedco Publishing, 1986.
  2. FOLIKPO, Komdedzi Kofi: Éléments de Philosophie politique africaine: Culture démocratique multimillénaire chez les Peuples du Golfe de Bénin. (Manuscrit initialement publié en 2002 sur Togocity.com, actuellement téléchargeable à partir du site Academia.edu )
  3. FOLIKPO, Komdedzi Kofi: Toponymes, Patronymes, Ethnonymes, Hydronymes et Histoire des Ewe. Jalons pour une Historiographie obejctive d’Agu-Kebo-Toé. Saarbrücken (Allemagne): Presses Académiques Francophones, 2017.
  4. KOSSI, Komi E.: La structure socio-politique et son articulation avec la pensée religieuse chez les Aja-Tado du Sud-Est Togo. Stuttgart (Allemagne): Franz Steiner Verlag, 1990.
  5. PAZZI, Roberto: Introduction à l’histoire de l’aire culturelle ajatado. Lomé:INSE/UB,1979.

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